jeudi 5 avril 2012

Respectez la loi Mme Berra !

Alors que depuis quelques années, nous ne cessons d’assister à des reculs préoccupants en matière de contraception et d’IVG, la Secrétaire d’Etat à la Santé Mme Nora Berra n’a rien trouvé de mieux à dire – probablement pour agrémenter encore la campagne très à droite du Président-candidat qui avait commencé avec les propos de M. Guéant puis de M.Vanneste – que son refus de l’anonymat et de la gratuité pour les mineures.

Les déclarations pernicieuses de Mme Bera apparaissent sont particulièrement malvenues à un moment où il faut plus que jamais renforcer les politiques de prévention et relèvent d’un positionnement purement idéologique.

Elles s’inscrivent dans un climat délétère de fragilisation de l’accès des femmes – et en particulier des plus jeunes – à l’avortement et à la contraception.

Plutôt que de servir des discours culpabilisants, le gouvernement serait bien plus inspiré de respecter la loi et de réunir les conditions de son application.

Celle de 2001 consacrant à raison de trois séances annuelles l’éducation à l’égalité et à la sexualité comme devant faire partie du socle commun des compétences et des connaissances à acquérir par tous les élèves mais aussi la disposition prévue par la loi de la même année qui devait permettre à des jeunes filles mineures d’avoir une contraception sans autorisation parentale auprès d’un médecin de ville et qui est restée lettre morte faute de modalités de prise en charge financière permettant l’application large de cette possibilité.

Faut-il rappeler que le Planning familial et les centres de planification sont des lieux privilégiés pour l’accueil, l’écoute et l’accompagnement des jeunes en matière de contraception et de sexualité? Faut-il rappeler que le Planning familial, en plus des attaques idéologiques dont il est l’objet, a de nouveau été la cible du gouvernement qui prévoit une baisse conséquente de ses subventions ?

Faute de campagnes massives de sensibilisation et d’un travail régulier d’information, la majorité des jeunes n’a tout simplement aujourd’hui pas accès à la contraception.

Mme Berra doit prendre en tant que membre du gouvernement ses responsabilités : les jeunes n’ont pas besoin d’injonctions contreproductives ni de discours moralisants autour de la reconnaissance de leur sexualité.

Le respect des lois, la garantie de l’accès des jeunes filles à la contraception et à l’IVG, la préservation des droits fondamentaux vaudront toujours mieux que les leçons de morale datées d’un pouvoir qui s’assume comme de plus en plus rétrograde.


Fatima Lalem, Adjointe au Maire de Paris en charge de l’Egalité femmes-hommes

Paru dans le journal Libération le 5 mars 2012.
Droit à l’IVG : face aux menaces, une prise de conscience nationale s’impose

Depuis 2009, sans concertation avec les équipes, des centres IVG ne cessent d’être regroupés, délocalisés, fondus dans des maternités, remplacés par des activités plus rémunératrices. A chaque fois le nombre de place pour les femmes baisse, les conditions d’accueil se dégradent. Faire une IVG à l’hôpital public par la méthode de son choix devient de plus en plus difficile.

En France en 2012, il n’est même pas besoin pas besoin d’afficher des positions anti avortement comme Marine Le Pen pour agir contre la liberté des femmes à choisir ou non la poursuite d’une grossesse. Administrations de santé et directions d’hôpitaux s’en chargent, la main sur le cœur pour affirmer leur attachement au droit des femmes, avec la réforme du secteur hospitalier et les réductions budgétaires.

Les pouvoirs publics doivent agir immédiatement pour garantir aux femmes partout sur le territoire national une prise en charge hospitalière, un accès aux soins égal pour toutes y compris les plus démunies.

Nous demandons :

La suspension des réorganisations hospitalières menant à la fermeture de centres IVG

Le maintien des structures existantes de proximité

La garantie de rendez-vous dans les délais prévus par la loi

La gratuité de la contraception

La poursuite des campagnes d’information sur la contraception et l’IVG


Il n’y a pas d’égalité femmes/hommes sans respect du droit inaliénable des femmes à disposer de leurs corps.

Dans quelques mois, les Françaises et les Français vont faire un choix démocratique important pour l’avenir de notre pays, nous demandons aux responsables politiques et aux candidats des engagements clairs en faveur du droit à l’avortement et à la contraception.

Premières signataires :
Fatima Lalem, Adjointe au Maire de Paris en charge de l’Egalité femmes-hommes
Sophie Gaudu, gynécologue-obstétricienne (Paris), Sophie Eyraud, médecin généraliste (92).


Fatima Lalem, Adjointe au Maire de Paris en charge de l'Egalité femmes-hommes

Paru sur Slate, le 17 février 2012.
Propos de Claude Guéant : Nous ne sommes pas dupes de l’instrumentalisation des femmes

Toujours prêt à chasser sur les terres de l’extrême droite, le Ministre de l’Intérieur a estimé ce samedi que « toutes les civilisations ne se valent pas » en donnant comme exemple, pour justifier son utilisation de la rhétorique lepéniste, la place des femmes au sein des différentes sociétés.


Ce n’est pas la première fois que ce gouvernement instrumentalise les femmes ou qu’il confond sciemment les peuples et leurs régimes politiques pour de minables calculs électoraux. Le débat sur l’identité nationale, prétexte à tous les amalgames et les dérapages, en a été l’une des illustrations les plus malheureuses.

Si M. Guéant se préoccupait sincèrement des droits des femmes, il aurait pourtant nombre de raisons de s’indigner sans, par ailleurs, jeter, comme il se plaît à le faire, nos compatriotes les uns contre les autres.

Pourquoi ne s’est-il pas exprimé quand Marine Le Pen a attaqué frontalement le Planning familial et prôné le déremboursement de l’IVG ?


Pourquoi reste-t-il sans réaction devant les provocations des militants intégristes qui manifestent devant l’Hôpital Tenon pour intimider les femmes souhaitant avorter ?

Pourquoi n’a-t-il pas poussé le Président de la République à agir pour que quarante ans après la loi Weil, le droit des femmes à pouvoir disposer de leur corps ne soit plus un parcours du combattant tandis que les fermetures des centres IVG se multiplient sur notre territoire ?

Pourquoi n’a-t-il jamais exprimé sa préoccupation face à la précarisation rampante des femmes ou aux inégalités salariales entre les femmes et les hommes qui perdurent et se creusent ?

Pourquoi n’a-t-il pas poussé son collègue de l’Education nationale à appliquer la loi de 2001 sur l’éducation à l’égalité et à la sexualité pour lutter contre les stéréotypes sexistes dans les établissements scolaires ?

Pourquoi s’est-il tu quand les nouveaux amis lybiens du Président de la République ont réintroduit la Charia comme loi essentielle de leur pays ?

Pourquoi n’a-t-il pas eu à contrario un mot pour soutenir les très nombreuses femmes qui, au Maghreb et au Machrek, sont descendues dans les rues et se sont mobilisées, au cours des mouvements révolutionnaires qui ont agité leur pays ces derniers mois pour promouvoir tout à la fois la démocratie, la laïcité et l’égalité des droits ?

La réponse à ces questions, celles et ceux qui sont attachés au principe constitutionnel de l’Egalité entre les femmes et les hommes la connaissent déjà.


Ils savent bien qu’il n’y a rien à attendre de ce gouvernement qui ne compte ni ministère ni même secrétariat d’Etat dédié aux droits des femmes.

Pas plus que les précédentes, cette énième tentative d’utiliser les droits des femmes dans le seul but de stigmatiser, de diviser et d’affaiblir notre modèle républicain ne fonctionnera pas.

Alors que les droits des femmes n’ont jamais autant régressé depuis trente ans que sous ce gouvernement, ce ne sera pas sur ses déclarations mais sur ses actes que le pouvoir en place sera jugé.

Par Fatima Lalem, adjointe au Maire de Paris et Marie-Arlette Carlotti, responsable du pôle "égalité femmes-hommes" dans l'équipe de François Hollande

Paru dans le journal Le Monde, le 10 février 2012.