lundi 14 juin 2010

Parité et Politique : les sœurs ennemies ?

Dix ans après la loi sur la parité en politique du 6 juin 2000 favorisant « l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives », un bilan s’impose.

Ce bilan me semble contrasté et les quelques avancées perceptibles ne sauraient être suffisantes. Avec le projet de réforme des collectivités territoriales voté mardi 8 juin au Parlement, le débat est plus que jamais d’actualité. Le projet de rénovation soumis au Conseil National du PS le même jour apporte néanmoins une note d’optimisme.

10 ans de parité… quel bilan ? quelles perspectives ?

Si les avancées sont manifestes (bien que perfectibles) pour les scrutins de liste (élections municipales, régionales ou européennes) grâce à l’alternance stricte imposée par la loi de 2000, les scrutins uninominaux ne permettent d’atteindre que 18,5% de députées et 22% de sénatrices (contre 48% de conseillères régionales ou près de 45% de femmes au Parlement européen).
Mais le simple scrutin de liste ne saurait tout résoudre, puisque même si les listes sont paritaires, cela ne signifie pas nécessairement que 50% des personnes élues seront des femmes. En effet, les femmes héritent des circonscriptions les plus difficiles.

Certains pourcentages qui peuvent paraître élevés sont à relativiser car si les femmes représentent 48% des conseillers municipaux dans les grandes villes, 86% des maires sont des hommes !

La contrainte juridique et financière a également montré ces limites. Les partis politiques français préfèrent payer plutôt que d’élire des femmes. Mais cette résistance est variable : si le PS paie 500 000 euros par an, les sanctions financières à l’encontre de l’UMP atteignent 4 millions d’euros !

Malgré les promesses de Nicolas Sarkozy en 2007, le gouvernement ne saurait montrer la voie en matière de parité puisque si les femmes représentaient 46% des ministres au printemps 2007 et n’occupent plus que 22% des postes aujourd’hui.

Et cette misogynie politique est une « exception culturelle française ». Mauvais élève en Europe, la France se place au 19ème rang en termes de présence féminine au sein de la première chambre législative.

Un simple changement de scrutin ne saurait suffire, il faut également travailler sur les représentations même si aujourd’hui 90% des Français sont favorables à l’accession d’une femme à la présidence de la République contre seulement 30% de l’opinion en 1974. Cela illustre bien l’importance d’actions d’éducation à l’égalité. La Mairie de Paris l’a bien compris et met en place une politique volontariste en la matière.

Avec les conseillers territoriaux, la droite enterre la parité

La réforme des collectivités territoriales prévoyant un mode de scrutin uninominal à deux tours pour l’élection des conseillers territoriaux nuit gravement à la parité. Le nombre d’élus va être fortement réduit, les places seront « chères ». De plus les conseillers généraux sortants, très majoritairement des hommes, vont être considérés comme les candidats « naturels » puisque le mode de scrutin est identique.
Le mode électoral retenu va porter préjudice aux nouveaux venus de la scène électorale comme les femmes, au profit de notables de la vie politique française.
Au final, les projections nous laissent penser qu’avec cette réforme, on passera de 48% de conseillères régionales à 17% de conseillères territoriales.
Cette indifférence à la parité était telle, que la constitutionalité du projet de loi faisait doute. Des hommes et femmes politiques du PS ont donc prévu de saisir le conseil constitutionnel. Je les soutiens dans cette démarche.
L’amendement Perben voté vendredi 4 juin à la va-vite mettant en place un micmac financier destiné à favoriser la parité des conseillers territoriaux (par simple crainte de l’inconstitutionnalité du projet de loi) ne saurait faire illusion.

Une rénovation paritaire qui commence à gauche

Le vote au sein du parti socialiste de la fin du cumul des mandats est une fenêtre vers une vie politique plus paritaire. En effet, le cumul encourage la constitution de fiefs locaux qui ne laissent que peu de place aux femmes. De plus le PS a inscrit dans son projet de rénovation une parité intégrale des instances du parti et un objectif de 50% de députées en 2012.

A lire à ce sujet : une interview d’Elisabeth Guigou au journal Le Monde
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