jeudi 15 juillet 2010

Violences faites aux femmes : quoi de neuf du côté législatif ?

La Mairie de Paris s'engage sur une politique volontariste de lutte contre les violences aux femmes
Les violences à l'encontre des femmes constituent un fléau qui impose au-delà de la nécessaire dénonciation, une réelle mobilisation de tous les acteurs et en premier lieu les pouvoirs publics. La Mairie de Paris d'est donc engagée résolument avec son maire, Bertrand Delanoë, sur une politique volontariste de lutte contre ces violences.
Une étape a été franchie avec la signature du nouveau Contrat Parisien de Sécurité en 2009 qui comporte désormais un objectif prioritaire sur la lutte contre les violences faites aux femmes.
L'engagement de la Ville de Paris se traduit également par un soutien au associations de lutte contre les violences faites aux femmes et à leur travail en réseau. Cette démarche va de pair avec la mise en oeuvre d'actions de sensibilisation et de formation en direction des travailleurs sociaux, la mise en place d'une campagne de sensibilisation sur les violences dans la couple à l'occasion du 25 novembre dernier et également une formation au profit des élus concernant les mariages forcés.
Quoi de neuf en la matière du côté législatif ?

Sur une proposition menée de front par deux députés dont Danielle Bousquet pour le PS et Guy Geoffroy pour l’UMP, le Sénat le 23 juin dernier, puis l’Assemblée Nationale le 28 juin, ont tous les deux adopté la proposition de loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Même si la législation française n'est pas totalement satisfaisante dans ce domaine, il faut saluer les avancées de ce texte qui est particulièrement innovant en matière de protection des victimes. Les violences faites aux femmes demeurent une réalité inhumaine, injustifiable et malheureusement quotidienne puisque tous les deux jours et demi, une femme meurt sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint. Les chiffres atteignent même 460 décès selon les estimations d’une nouvelle étude si l’on compte les décès « collatéraux » (les décès d’enfants ou les suicides).

Trois dispositions majeures pour la protection des victimes

Il sera donc désormais possible pour le juge des affaires familiales « d’organiser l’éviction de l’auteur des violences du domicile familial » par le biais d’une ordonnance de protection avant même le dépôt d’une plainte. Cette ordonnance pourra protéger des femmes menacées de coup mais également de mutilations sexuelles ou de mariages forcés. Ce dispositif ne sera pas restreint aux couples mariés et s’adressera également aux couples pacsés ou concubins.

Autre avancée majeure, la création du délit de violence psychologique entre conjoints. Cette disposition devrait permettre d’enrayer le phénomène d’escalade de la violence au sein du couple an agissant plus tôt et plus rapidement. Ce dispositif est d’autant plus important que les violences physiques font souvent suite aux violences psychologiques.
Néanmoins, comme dans le cas du harcèlement moral, il va être difficile pour la victime d’apporter la preuve des « agissements ou paroles répétés entraînant une dégradation des conditions de vie de la personne qui les subit ».

Enfin, le bracelet électronique devrait être expérimenté afin de maintenir le conjoint violent à distance de la victime.

Des dispositifs de prévention en amont

Des dispositifs de prévention seront également mis en place selon l'initiative du sénateur Roland Courteau. Cette prévention passe par des séances de sensibilisation dans les écoles autour des thèmes de l’égalité filles/garçons et de la sexualité. La Ville de Paris a déjà saisi l’importance de cette sensibilisation et travaille à la coordination des actions d’éducation à l’égalité et à la sexualité au sein des établissements scolaires parisiens.

Il faut rester vigilant.

Comme l’explique clairement le CNDF dans son communiqué de presse, ces propositions de loi entretiennent la dépendance des femmes (dépendance vis-à-vis du juge des affaires familiales pour l’ordonnance de protection), restreignent leur autonomie (maintien du droit de visite des pères par exemple) et les empêchent de se défendre elles-mêmes. La judiciarisation des dispositifs de protection des victimes exclut de fait une partie des femmes qui ne peuvent pas s’insérer dans le système judiciaire français.

Même s’il faut se féliciter de toute avancée législative à ce sujet, il faut tout de même souligner les imperfections, les manques importants de ce dispositif et le biais des orientations retenues qui font une trop grande place au système judiciaire. Je resterai également vigilante aux délais et conditions de mise en pratique de cette proposition, afin qu’elle ne deviennent pas une coquille vide supplémentaire faute de moyens humains et financiers.